Produits fermiers : soyez vigilants
Les modes de valorisation des produits agro-alimentaires sont encadrés par les pouvoirs publics. Le terme “fermier” est particulièrement porteur : il épouse les préoccupations écologiques des consommateurs, de plus en plus méfiants envers les productions industrielles. Le risque d’une utilisation abusive par certains est d’autant plus grand.
Il n’existe pas de définition réglementaire applicable à tous les produits fermiers. Pour les volailles, par exemple, le règlement de la Commission n° 1538/91 régit l’emploi des mentions “fermier-élevé en plein air” et “fermier-élevé en liberté” en fixant la densité dans les bâtiments et l’âge d’abattage des animaux.
Pour les fromages et spécialités fromagères, une définition du terme fermier est donnée par le décret du 27 avril 2007 : produit “fabriqué selon les techniques traditionnelles, par un producteur agricole ne traitant que les laits de sa propre exploitation sur le lieu même de celle-ci”. Des définitions “contractuelles” existent par ailleurs.
Ainsi, le code des usages de la charcuterie précise que le terme “fermier” s’applique à des produits fabriqués à la ferme, avec des viandes d’animaux élevés à la ferme. L’utilisation de la mention “issu de porc fermier”, si elle est justifiée, est possible pour des charcuteries industrielles. En matière de labels agricoles, les notices techniques pour les volailles, les porcs ou les gros bovins définissent les conditions d’usage de cette allégation en fixant des règles strictes pour la densité, le parcours, l’alimentation.
La jurisprudence a fixé les grandes lignes pour une utilisation non mensongère de ce terme en préconisant des méthodes de production traditionnelle dans un circuit intégré à la ferme, en indiquant que les produits doivent provenir principalement de l’exploitation mais également des fermes voisines si l’exploitation conserve un contrôle direct sur les produits. En revanche, peu importent les modalités de commercialisation et le statut juridique de l’exploitation.
Une enquête de la DGCCRF
Cette enquête de l’été 2007, coordonnée par la DGCCRF, s’est appuyée sur une étroite collaboration interministérielle, en particulier avec les services vétérinaires. Plusieurs régions ont associé les chambres d’agriculture. En outre, de nombreuses actions de sensibilisation ont été menées auprès des professionnels.
En Alsace, l’attention de la direction du Haut-Rhin avait été attirée sur l’étiquetage de yaourts aux fruits fermiers de fabrication locale mentionnant une importante quantité de fruits. L’animatrice du réseau “Bienvenue à la ferme” de la chambre d’agriculture du Haut-Rhin avait précisé que certains producteurs fermiers utilisaient des préparations industrielles de fruits avec du sucre, des gélifiants et des épaississants achetés dans le commerce de gros. Ces types d’ingrédients, faciles d’emploi, ne sont pas conformes aux méthodes traditionnelles. La chambre d’agriculture s’est engagée à informer les producteurs sur l’interdiction d’utiliser ce type de matière première dans les produits fermiers. Des contrôles seront effectués dans le Haut-Rhin sur le mode de fabrication des yaourts fermiers.
En Auvergne, au cours d’un contrôle à la ferme, il a été établi que des fromages fermiers ne respectaient pas les techniques usuelles de production. Une réunion organisée avec la chambre d’agriculture et les producteurs a permis de régulariser les procédures de production.
En Midi-Pyrénées, une action préalable d’information sur la réglementation applicable a été réalisée en Ariège au mois de juillet 2007 auprès de producteurs fermiers, en collaboration avec la direction départementale des services vétérinaires, dans le cadre d’une réunion organisée par la chambre d’agriculture. À l’occasion de l’installation d’un marché “fermier”, à Foix, une visite a permis d’apporter aux producteurs toutes les informations réglementaires utiles et de s’assurer du caractère licite de l’installation de tous les opérateurs au regard de la nature particulière du marché.
En Poitou-Charentes, la Direction des Deux-Sèvres souligne l’activité des “Marchés des producteurs de Pays”. Organisés et animés par la chambre d’agriculture, ils ont réuni une soixantaine de producteurs fermiers. Il a été constaté le très bon niveau de professionnalisme des intéressés. Il s’agit sans doute de la conséquence d’une organisation rodée sur plusieurs années qui s’appuie notamment sur des actions de formation antérieures.
En Franche-Comté, un travail d’information en amont des circuits de production, mené dans le Jura avec la chambre d’agriculture et, de façon plus étroite, avec les services vétérinaires, a permis, lors de l’installation de nouveaux producteurs, de limiter les risques d’allégations trompeuses ou de non-conformité des étiquetages des produits. Par ailleurs, les producteurs de fromages, qui sont les principaux utilisateurs du terme “fermier”, font l’objet de contrôles communs et réguliers avec les services vétérinaires pendant l’Opération Interministérielle Vacances.
En Haute-Saône, à la demande du Centre de formation professionnelle et de promotion agricoles (CFPPA) de Vesoul, la direction intervient chaque année auprès de stagiaires adultes, dans le cadre de leur formation “Transformation et commercialisation des produits laitiers fermiers” pour leur exposer la réglementation relative à la production et la vente de produits laitiers fermiers.
En Picardie, la direction de l’Oise a effectué une sensibilisation auprès des professionnels des métiers de bouche concernant les produits fermiers.
En définitive, cette enquête a révélé que le qualificatif fermier, malgré d’inévitables dérives, était souvent utilisé à bon escient et que ces produits ne nécessitaient pas une attention plus appuyée que celle portée aux produits non fermiers. Beaucoup de régions mettent en avant le fait que la plupart des professionnels rencontrés sont des producteurs soucieux de l’image de leurs produits, dont ils assurent la commercialisation.
De surcroît, plusieurs régions travaillent en relation soutenue avec les chambres d’agriculture qui apportent leur concours, en particulier pour la charte “Bienvenue à la ferme”. Cette coopération permet d’informer les professionnels en amont sur leurs obligations réglementaires, voire d’assurer des formations.
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