Près des 3/4 des Français ne consomment pas assez de fruits et légumes

La septième vague de l’enquête CCAF (Comportements et Consommations Alimentaires des Français), réalisée par le Crédoc entre octobre 2009 et juillet sur des échantillons représentatifs de la population française, confirme la faible consommation de fruits et de légumes en France aujourd’hui : seuls 27% des individus parviennent à atteindre la recommandation du PNNS (Programme National Nutrition Santé) de cinq portions de fruits et légumes par jour.
Une sous-consommation persistante chez les jeunes liée à un fort effet générationnel
 Comme le précise Pascale Hébel, directrice du département consommation du Crédoc, « le message nutritionnel du PNNS n’a visiblement pas eu l’effet escompté sur les générations actuelles, alors qu’il a été plutôt bien mémorisé par les plus âgés, qui consomment près du double de fruits (200 g par jour, contre 100 g/jour pour les premiers).
Cette tendance s’explique très bien par l’évolution des modes de vie. On cherche en semaine des produits simples, rapides et faciles à manger, tout prêts, qui n ‘ont pas besoin d’être lavés, épluchés, cuisinés… et qui se stockent facilement. Car entre un fruit qu’il faut consommer assez rapidement et un yaourt qui peut se conserver plusieurs semaines au réfrigérateur, le choix est vite fait ! Les plus jeunes n’aiment pas être tachés ou avoir les mains pleines de jus, « quand ça colle », comme ils disent.»
La durée de conservation, le stockage mais surtout la praticité restent par conséquent les premiers freins à l’achat de fruits frais, qui pâtissent d’un effet générationnel négatif, chaque nouvelle génération en consommant moins que les anciennes générations au même âge.
Résultat : si 69 % des adultes n’atteignent pas aujourd’hui le repère de consommation du PNNS, c’est le cas de 91 % des plus jeunes. Une bonne nouvelle toutefois : si, chez les enfants et adolescents, le nombre des « petits » consommateurs (entre 2 et 3,5 portions/jour) est stable (38% en 2007 et 2010), celui des « très petits » consommateurs tend à baisser de façon significative : ils étaient 38% en 2007 à bouder les fruits et les légumes, contre 32% en 2010 (chez les adultes, la baisse est moins flagrante : en 2007, ils étaient 47% à consommer moins de 3,5 portions par jour ; en 2010, ils sont 45%).
Une transmission parent-enfant qui reste limitée pour les fruits
Les enfants suivent-ils l’exemple de leurs parents ? On connaît en effet l’importance de l’imitation dans la construction du répertoire alimentaire de l’enfant. Si « l’effet d’imitation » profite aux légumes, il n’a que peu d’impact sur la consommation de fruits.
« Contrairement au modèle américain où chacun se sert dans le réfrigérateur, en France, on partage toujours ses repas en famille, analyse Pascale Hébel. Mais la structuration des repas a changé. L’entrée (soupe, crudités) et le dessert (fruits) ont progressivement cédé la place au plat unique. Le repas se termine souvent sur une crème dessert ou un yaourt. Contrairement aux légumes, qui se retrouvent dans le plat principal, les fruits sont les grands perdants de ce nouveau menu. »
Quels profils pour les consommateurs de fruits ?
Le portrait robot du petit consommateur de fruits ? Plutôt ouvrier ou employé, souvent à la tête d’une famille nombreuse – la consommation de fruits décroît avec le nombre de personnes vivant dans le foyer. La quantité de fruits consommée augmente dans les familles où les deux parents sont actifs. Le petit consommateur est également fumeur, il est en surpoids ou au régime, et s’intéresse peu à la cuisine et à la nutrition.
« C’est essentiellement la catégorie socio-professionnelle qui creuse l’écart entre les petits et les gros consommateurs de fruits, que l’on retrouve chez les CSP+, commente Pascale Hébel. Mais plus que les revenus, on observe un « effet diplôme », les Français les plus éduqués consommant davantage de fruits que les autres parce qu’ayant sans doute mieux compris les messages nutritionnels. »
Les enfants et les adolescents n’échappent pas à la règle. Là encore, ce sont les plus éduqués (dont les parents sont CSP +) qui consomment le plus de fruits et de légumes.
Deux autres facteurs à prendre en compte : l’influence négative de la sédentarité – moins l’enfant bouge et fait du sport, plus il regarde la télévision ou joue sur un écran et moins il mange de fruits – et l’habitat, les enfants vivant en agglomération parisienne consommant plus de fruits que les autres (catégorie socio-professionnelle plus élevée, facilité d’approvisionnement grâce à la proximité de Rungis).
« La vraie surprise de l’enquête concerne l’influence culturelle, fait remarquer Pascale Hébel. En effet, les enfants d’origine étrangère consomment plus de fruits que les personnes d’origine française. Ce qui permet de constater une nouvelle fois l’importance de la dimension culturelle de l’alimentation, au-delà des pratiques socio-économiques. »
Une baisse structurelle de la consommation de fruits frais … compensée par une hausse de la consommation des fruits sous toutes leurs formes (hors frais)
 Autre enseignement intéressant de l’étude : la nette progression en 2010 de la consommation des fruits sous d’autres formes que le frais. Cette part est en forte croissance entre 2003 et 2007 chez les enfants (11 % en 2003 et 23% en 2010), elle représente en 2010 15% de la consommation des fruits chez les adultes, contre 10% trois ans plus tôt.
« Les consommations de fruits qui progressent, dans le « hors frais », sont donc celles qui favorisent la praticité, tant en terme de consommation que de stockage et de conservation, rappelle Pascale Hébel. Faciles à emportera l’école, au bureau… et à manger quel que soit le moment de la journée, compotes, desserts de fruits et fruits au sirop voient leur consommation augmenter. Pour pallier la faible consommation des Français en fruits, il conviendrait d’augmenter l’offre en produits faciles à consommer. »
(Pascale Hébel, Directrice du Département Consommation du Crédoc – Conférence de presse AFIDEM/Protéines – 15 novembre 2011)
Source : http://www.i-dietetique.com