Fiscalité verte : requiem pour la taxe carbone
Le Premier ministre, François Fillon, a annoncé mardi l’abandon du projet-phare de fiscalité écologique, pourtant souhaité par l’Elysée. Motif : cette taxe, que la France était la seule à promouvoir en Europe, plombait la compétitivité des entreprises françaises. Pour les particuliers, l’augmentation des carburants de l’ordre de 4 centimes par litre, prévue au 1er juillet prochain, est donc caduque.
Officiellement, le gouvernement souhaite que cette taxe voie le jour à la condition qu’elle soit « européenne », la France ne souhaitant plus faire cavalier seul dans cette épopée que le Conseil constitutionnel avait déjà pour ainsi dire enterrée au début de l’année. Européenne, la taxe ? il fallait se pincer pour y croire : les Allemands –pour les mêmes raisons de compétitivité- n’en voulaient à aucun prix. Restent les pays d’Europe du Nord, toujours plus « verts » que les autres, et notamment la Suède : la fiscalité « verte » fait à l’évidence davantage partie de leur culture. Côté français, on observera que la « passion » écologique du président a sérieusement pâli ces temps derniers : au Salon de l’Agriculture, il est apparu très en retrait sur ce domaine, estimant d’ailleurs que les agriculteurs étaient suffisamment sinistrés pour que l’on vînt encore les chagriner avec de nouvelles contraintes environnementales.
Sur la taxe carbone, qui fit longtemps figure de projet fétiche de Nicolas Sarkozy, le même Nicolas Sarkozy l’avait enterrée dans les colonnes de « Figaro Magazine » en affirmant que cette forme de fiscalité ne pouvait être envisagée qu’au niveau européen, une façon de prononcer le requiem d’une taxe qui promettait d’être très impopulaire et pour tout dire à peu près inapplicable. Morale de l’histoire : c’est la fin probable du « greenwashing » présidentiel. Le président de la République a lu les résultats des élections régionales et compris, cette fois, que l’électorat écologiste était résolument à gauche et que les tentatives de l’exécutif pour le séduire étaient parfaitement vaines. Cette volte-face présidentielle tient aussi pour partie à la nette perte de crédit, auprès de l’Elysée, des inspirateurs de cette taxe -par exemple Nicolas Hulot-comme d’ailleurs des dogmes écologiques dont l’exécutif s’était entiché jusqu’à présent. Jean-Louis Borloo, le ministre de l’Environnement jurait voici peu que la détermination des pouvoirs publics était intacte et cette maudite taxe verrait bien le jour à la date prévue. Le Premier ministre a réécrit la partition en prononçant lui-même l’oraison funèbre de cet impôt mort-né.